samedi 1 juin 2013

Une Chanson pour Lya - George R. R. MARTIN


Titre (VF/VO): Une Chanson pour Lya et autres nouvelles/ 
A Song for Lya and other stories
Auteur : George R. R. MARTIN 
Traduction :  Monique CARTANAS et M.-C. LUONG
Édition : J'ai Lu
Illustration : Marc SIMONETTI 
Genre : Science-Fiction
Format : Novella/Nouvelles
Première parution VO : 1976
Dernière parution VF : 2013
Pages : 320
Prix : 6,90 euros


Tout le monde connait George R.R. Martin, au moins de nom, depuis l'intérêt considérable que la saga du Trône de Fer a suscité avec son adaptation télévisée. Cependant, l'auteur a derrière lui une longue carrière littéraire, qui débuta bien avant le Trône de Fer (saga qui a déjà elle-même plus de quinze ans !). Cette partie de son œuvre semble malheureusement méconnue chez nous, et c'est bien dommage ! Saviez-vous qu'il excelle aussi bien en SF et en format nouvelle ? Laissez-moi vous en convaincre avec Chanson pour Lya !

Chanson pour Lya est la novella du recueil auquel elle a donné le nom. Un couple de Terriens, ou plus exactement de Talents, sont envoyés sur la planète Ch'kéa afin d'enquêter sur la religion locale, le Culte de l'Union. En effet, ce couple possède des capacités spéciales, Robb peut "sonder" les émotions des gens et Lyanna sait lire dans leurs pensées. Le but de l'enquête est de comprendre pourquoi tous les habitants de Ch'kéa, y compris les humains, deviennent Adhérents et acceptent d'aller jusqu'à l'Union finale autrement dit acceptent à terme de se suicider/sacrifier au nom du Culte. 
J'ai beaucoup aimé cette novella très immersive qui nous amène à nous interroger sur la définition de l'amour et sur la solitude ontologique des êtres vivants, c'est-à-dire l'impossibilité aux êtres vivants d'assouvir leur désir de fusion mentale et physique afin de tout connaître de l'être aimé.

Au matin tombe la brume est une belle nouvelle très terre à terre qui nous pose la question de la légitimité de la vérité et le rôle qu'y joue la science. En effet, la planète Spectralia de par son système climatique particulier a engendré la rumeur qu'elle serait habitée par des spectres. C'est cette rumeur qui a fait de Spectralia un site touristique, une critique est donc faite sur l'incapacité de ces touristes à s'émouvoir du paysage. Le problème est de savoir si cette rumeur est vraie ou fausse mais surtout si la vérité s'impose d'elle-même ou s'il est bon parfois de la mettre sous silence, car la science cherchera toujours à connaître la vérité. Je tiens à signaler que j'ai beaucoup aimé la conclusion ironique de cette nouvelle mais je ne la citerai pas pour éviter de gâcher la surprise. Cependant, je me permets de noter ce petit clin d’œil aux Chroniques Martiennes : Dans le courant de la conversation, je lui dis que j'étais né à Bradbury, pendant des vacances que mes parents passaient sur Mars.

Il y a solitude et solitude ou comment devenir un fou isolé dans l'espace ! A travers son journal intime, un Terrien nous relate l'attente de son remplaçant à bord du vaisseau Charon. En effet, unique habitant de l'Anneau stellaire de Cerbère depuis quatre ans, il est le seul chargé de passage des astronefs. On peut donc comprendre qu'il ait envie de rentrer sur Terre, surtout que son départ était en fait une fuite surtout motivée par une peine de cœur... Mais où diable est le Charon ?!
La chute est intéressante mais je n'ai pas vraiment adhéré à cette nouvelle car je suis restée insensible voire agacée par la psyché du personnage.
On remarquera un petit clin d’œil à deux chansons de Simon & Garfunkel : The Sound of Silence et I am a Rock, I am an Island.

C'est fou ce qu'on est capable de faire Pour une poignée de volutoines ! Matt Kabaradjian va en faire la douloureuse expérience ! En effet, Matt exerce un métier très particulier sur la planète Spéléa : il est chargé de récolter des pierres précieuses appelées volutoines avec comme main d’œuvre... des cadavres qu'il peut contrôler par la pensée à l'aide d'un appareil ! Bien sûr cette méthode étonnante adoptée par ces travailleurs ne fait pas l'unanimité auprès des autres colons, ce qui va faire naître un conflit. Cette nouvelle est centrée sur une scène d'action prenante dont la conclusion ne peut qu'être cruelle.

Le Héros dénommé John Kagen, un mercenaire natif des mondes guerriers de Wellington, aimerait prendre sa retraite sur Terre. Alors qu'une guerre se prépare, accepteront-ils d'abandonner un de leurs meilleurs éléments, qui plus est un guerrier né, à un repos mérité sur Terre ? Bien que la fin soit prévisible et glaçante, j'ai beaucoup aimé comment elle est amenée et surtout le cynisme dégagé par le commandant et ses méthodes. Il est question aussi indirectement de réfléchir à la possibilité de s'extraire de sa condition : Kagen, guerrier durant toute son existence, peut-il encore déposer les armes ?

J'ai été très enthousiaste à la fin de ma lecture de L'éclaireur ! Pourtant, l'histoire débute très simplement et on ne voit pas vraiment où l'auteur veut en venir. Une guerre particulièrement destructrice sur Terre force les Hommes à se réfugier dans des souterrains, où ils finiront par s'adapter voire muter suite à la trop forte radioactivité en surface. Pendant ce temps, une colonie lunaire fondée avant le conflit lutte pour sa survie, oubliée de la Terre. Des années plus tard, une expédition est envoyée sur Terre par ces colons afin de chercher des survivants et lancer une politique de repeuplement. Le cœur de la nouvelle repose donc sur la rencontre potentielle entre ces deux populations.
J'ai beaucoup apprécié comment l'auteur illustre l'incompréhension réciproque entre "colonisateurs et colonisés". La surprise de Von der Stadt et les dialogues qui en découlent sonnent terriblement justes, évitant l'écueil du manichéisme.
Décidément, George R. R. MARTIN a un faible pour Simon & Garfunkel car il y fait encore une allusion dans cette nouvelle.

VSL est surement la nouvelle la plus courte que j'ai lu (5 pages). En cela, il me paraît très difficile d'en parler correctement sans spoiler. Le problème du physicien Kinery est simple : pourquoi la fondation VSL refuse de financer ses recherches sur le moteur hyperespace ? La réponse est assez étonnante !

Première et unique déception de ce recueil à mon sens : La sortie de San Breta. Il s'agit d'une simple histoire d'autoroute hantée par un accident dans un futur où seuls quelques nostalgiques des routes les utilisent encore. De même que nos fantômes du futur naissent des morts violentes de notre temps. N'ayant pas du tout la passion des voitures, la nostalgie de l'ère automobile m'a laissé de marbre.

Diaporama dépeint le triste sort de Becker, un ex-commandant de vaisseau pour l'entreprise ESPACE, muté contre son gré et à présent chargé de faire de la promotion sur Terre auprès de potentiels financeurs. On assiste dans cette nouvelle à une joute oratoire entre Becker et un médecin venu récolter des fonds pour son dispensaire. Cette confrontation d'idées est intéressante car elle nécessite un vainqueur mais les deux points de vues sont louables. La victoire se jouera donc sur d'autres critères...

En conclusion, je vous recommande chaudement de lire ce fascinant recueil. Pour ma part, cet auteur est devenu une valeur sûre et je compte rapidement dévorer entamer ses deux autres recueils Des Astres et des Ombres et Les Rois des Sables. Je suis curieuse aussi de découvrir Elle qui chevauche les tempêtes, en collaboration avec Lisa TUTTLE.
Et maintenant, qu'est ce que vous attendez pour lire du George R. R. MARTIN ?

[EDIT du 01/02/2014]
Quel fut mon étonnement en apprenant dans le recueil Au fil du temps de George R. R. MARTIN qu'une nouvelle manquait au sommaire de mon exemplaire de Chanson pour Lya (1982) ! Heureusement, ce recueil a eu droit en 2013 à une édition révisée et augmentée de cette nouvelle inédite. D'ailleurs, sa couverture signée Marc SIMONETTI est superbe ! J'avoue que j'avais des a priori négatifs au départ parce que je ne porte absolument pas le football dans mon cœur ! Il y a néanmoins une ambiguïté dans la traduction car il s'agit en fait de football américain. Et surtout, on se rend vite compte que le sport en lui-même ne constitue pas le cœur thématique de la nouvelle.

Imaginez un tournoi de football américain organisé sur Terre, auquel cherche à participer une équipe d'extraterrestres en paix depuis peu avec l'Humanité ! Le Run aux étoiles nous expose d'une manière intelligente et intéressante les problèmes qu'une telle situation peut poser. L'accent est surtout mis sur l'aspect politique, mais le texte tient aussi compte de l'aspect physiologique (problème d'équité). La race extraterrestre décrite dans la nouvelle est aussi intéressante en elle-même pour son fonctionnement social. Je peux vous assurer que même en étant une bille en sport comme moi, on s'immerge très facilement dans cet univers ! Au final, malgré mes craintes, cette nouvelle a complètement sa place dans ce recueil qui confirme son excellence !

Je tiens à préciser que l'ordre des nouvelles est fidèle à la parution initiale en VO mais je ne cautionne pas du tout ce choix ! Selon moi, une nouvelle/novella donne son appellation au titre du recueil s'il s'agit de l'écrit le plus représentatif ou le plus long. J'ai lu Une Chanson pour Lya en premier, la place la plus adaptée ! En aucun cas, elle ne doit être lue en dernier ! Ce choix a été renouvelé pour Les Rois des Sables, j'y reviendrai en détail quand je le chroniquerai mais à mon sens, ça a vraiment desservi la nouvelle !

NB : The Sound of Silence de Simon & Garfunkel me semble de rigueur, n'est-il pas ?


CITRIQ

3 commentaires:

  1. Un très bon recueil, tout comme les deux autres. Ce serait une erreur de ne s'arrêter qu'au Trône de fer en ce qui concerne George R.R. Martin...
    Comme toi j'ai trouvé que le point faible de recueil était "La sortie de San Breta", le reste est très bon.

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  2. Bonjour! Ca fait longtemps que je pense à lire ce recueil, j'en ai souvent entendu parler. En-dehors du Trône de Fer, j'ai déjà lu Riverdream. Je suis curieux de lire Martin dans d'autres registres. En tout cas, ton résumé donne envie de le découvrir!

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